Les parcours pour travailler son couple
Paul Dewandre

Le mythe du couple parfait est-il dangereux ?

Le mythe du couple parfait est souvent néfaste. Il abîme la relation amoureuse et fait souffrir les partenaires. Paul Dewandre, auteur, acteur et spécialiste du couple, explique pourquoi il convient d’être très vigilant vis-à-vis de notre idée du couple idéal, tout restant dans une dynamique constructive pour améliorer sa relation, trouver un équilibre et filer le parfait amour !

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Paul Dewandre s’est formé aux Etats-Unis auprès de John Gray, auteur du best-seller Les hommes viennent de Mars, les femmes viennent de Vénus. Initiateur des ateliers « Mars-Vénus » en Europe, il s’est fait connaître auprès du grand public à travers le spectacle éponyme qu’il a créé en 2006 et qu’il a joué plus de deux mille fois devant deux millions de spectateurs.

L’idée du couple parfait est-elle dangereuse pour le couple ?

Cheminer en fonction d’une idée que l’on se fait d’un couple idéal peut être une belle feuille de route, mais si elle est trop présente, elle peut entamer la relation. Car la notion de perfection est propre à chacun. L’image de la femme parfaite, de l’épouse idéale, du mari parfait ou de l’homme idéal varie d’une personne à l’autre. Si l’on n’y prend pas garde, on peut insidieusement finir par vouloir forcer son conjoint à correspondre à cette image plutôt que de le voir tel qu’il est.

Si celui-ci tente par amour de se conformer à cette image, il risque alors de s’enfermer dans un rôle qui n’est pas le sien et ne sera plus lui-même, ce qui est difficile à vivre sur le long terme. Et s’il résiste, le mythe du couple parfait et du partenaire idéal va générer des disputes, des tensions et des crises qui peuvent aller jusqu’à briser la relation conjugale.

D’où vient cette idée du couple parfait et cette vision idéalisée de l’amour ?

Un jour à Grenoble, lors d’un de mes spectacles, j’avais demandé qui détenait dans la salle le record de longévité de vie de couple ? Lorsqu’un couple m’a répondu « 43 ans », les 2000 personnes présentes se sont mises spontanément à ovationner ce couple qu’ils ne connaissaient pas.

Je me suis longtemps interrogé sur les raisons d’un tel engouement et j’ai fini par en conclure que, quand on démarre une belle histoire d’amour, on a envie qu’elle dure le plus longtemps possible. Si les comédies romantiques et les contes de Prince Charmant et de Princesse remportent toujours autant de succès, c’est peut-être tout simplement parce qu’ils entrent en résonance avec notre vision idéale d’un couple qui resterait amoureux pour toute la vie.

Mais comme on sait tous que la vie n’est pas toujours un long fleuve tranquille, applaudir la longévité de ce couple était une manière de les féliciter d’avoir réussi à rester ensemble depuis si longtemps.

Aujourd’hui, et même si on est sur son petit nuage au début d’une relation amoureuse, plus personne n’imagine aujourd’hui une vie de couple sans tensions, ni besoin d’ajustement. C’est donc aussi dans la capacité des conjoints à surmonter les périodes plus difficiles que l’on peut juger de la bonne santé d’un couple. Notamment, de mon point de vue, dans sa volonté mutuelle de rester attentifs aux besoins de l’autre.

Pour vous, qu’est-ce qu’un partenaire idéal ?

Le partenaire idéal est avant tout celui qui nous veut du bien. Il nous encourage au lieu de nous rabaisser. Il nous met en confiance plutôt que dans la crainte. Il nous motive à révéler la plus belle version de nous-même.

C’est un partenaire qui n’est pas pour autant à notre botte.  À certains moments, il nous poussera dans nos retranchements. Mais quand il met le doigt sur nos failles ou nos blessures, ce n’est pas pour nous rabaisser. C’est pour nous encourager à les dépasser. Encore faut-il le comprendre et l’accepter.

Faut-il faire le deuil du couple idéal et du conjoint parfait pour être heureux dans son couple ?

Chercher à façonner l’autre à l’image de ce partenaire idéal risque d’amener beaucoup de désillusions. Ce n’est pas à l’autre à s’adapter à ce qu’on attend de lui, mais à nous à rechercher dans l’autre ce qu’il a d’idéal pour nous. Et quand malgré les embûches, on parvient à rester tous les deux dans cette dynamique, cette image d’Épinal s’évanouit d’elle-même.

Est-il bon de prendre exemple sur d’autres couples qui ont l’air plus heureux, plus équilibrés ?  

l'idée du couple parfait et amoureux est-elle dangereuse ?S’inspirer d’un autre couple peut être une bonne chose. Prendre exemple sur les façons de faire qui nous inspirent et essayer de les mettre en place dans notre propre relation. Leur demander quels sont leurs outils, leurs « trucs » etc. Mais attention aux dérapages ! Car le risque de se comparer n’est jamais loin et se révèle particulièrement nocif.

 

Pourquoi comparer son couple à d’autres couples est-il dangereux ?

À mon sens, passer son temps à se comparer aux autres est avant tout le signe d’une insécurité intérieure.

Se comparer à des couples qui ont l’air d’aller moins bien peut être rassurant, mais ça ne résout aucun de nos problèmes. Et se comparer à des couples qui ont l’air d’aller mieux n’est pas plus utile pour avancer parce qu’on finit inévitablement par se rabaisser.

Les comparaisons sont toujours biaisées. D’une part parce qu’on compare généralement les attributs extérieurs de l’autre couple (leur niveau de vie, leurs enfants, leurs boulots, leurs relations, etc…) avec notre monde intérieur (ce que l’on vit au quotidien avec l’autre, toutes les petites frustrations dont on ne parle à personne, nos interrogations et nos doutes personnels).

D’autre part parce qu’on a de toutes façons tendance à comparer ce qui va bien chez l’autre par rapport à ce qui va mal chez nous, ou vice versa.  Ce qui nous amène soit à nous flageller, soit à nous croire supérieurs. Or, aucune de ces postures n’est constructive, ni pour soi, ni pour son couple.

Selon vous, comment réussir son couple ?

Je pense dans l’inconscient collectif, réussir son couple signifie réussir à maintenir au fil du temps une relation amoureuse harmonieuse et complice.

Or tous les couples vont inévitablement passer par des moments plus difficiles. Certains vont les surmonter et parviendront à resserrer les liens qui s’étaient distendus. D’autres se résigneront à vivre désormais côte à côte, mais plus ensemble, en faisant le deuil d’une complicité à jamais perdue. D’autres encore finiront par se séparer et partirons voler vers d’autres cieux pour retrouver un nouvel amour.

Rire en coupleDe mon point de vue, et même si l’envie de « vivre heureux jusqu’à la fin de ses jours » est largement partagée, il me paraît excessif de dire que ceux qui surmontent leurs crises « réussissent » leur couple. Car cela impliquerait que tous ceux qui ne suivent pas cette voie parfaite ou idéale le « ratent ».

De mon point de vue, le couple n’est pas un examen qu’on réussit ou qu’on rate. C’est un parcours de vie que l’on partage du mieux qu’on le peut.

Un arbre pousse comme il peut là où sa graine s’est mise à germer. De la même manière, ce sont nos différentes expériences de vie créées plus ou moins consciemment en fonction de notre passé, de nos croyances et de nos blessures d’enfance qui vont faire croître notre parcours en couple de manière singulière.

En outre, le couple fait partie d’un chemin de croissance individuel qui est vécu avec un autre.  L’arbre pousse plus ou moins tordu mais il pousse. C’est pareil pour l’être humain. Il ne peut pas louper sa croissance.

Dans votre dernier livre « La parabole du kayakiste » qui ne parle pas du couple, vous expliquez la nécessité d’adopter de nouveaux comportements pour s’adapter au monde qui vient. Or l’attitude que vous préconisez peut parfaitement s’adapter au couple. Est-ce exact ?

couple heureux se promenant près d'une rivière

Aujourd’hui, en couple comme dans la vie, beaucoup de gens fondent encore leur besoin de sécurité sur des éléments extérieurs : la maison, les enfants, l’argent, le travail, les relations sociales etc. Bien entendu, tout cela est rassurant. Mais quand un de ces éléments extérieurs est ébranlé, cela peut vite devenir très angoissant.

Malheureusement, dans notre société de plus en plus incertaine, plus personne n’est totalement à l’abri. En kayak, il faut pouvoir compter sur son habileté à pagayer pour tracer sa route ou encore à anticiper les variations de courant mais aussi à gérer les imprévus et à être prêt à être émerveillé par la découverte de nouveaux paysages. En d’autres termes, dans la rivière, nous sommes en sécurité grâce à nos ressources intérieures.

En couple aussi, plus nous nous sentirons engagés et soudés par des valeurs partagées de confiance en soi et en l’autre, et plus nous serons capables de parcourir joyeusement le chemin proposé par notre rivière de la vie.

Interview de Paul Dewandre réalisée par Sylvain Sismondi

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